Focus sur l’association Actions de Solidarité Internationale (ASI)

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Dans la conclusion de l’article sur l’association Uwema de Goma au Nord Kivu, je teminais par un questionnement sur la pitié dangereuse de nombreux organismes internationaux ou associations de bonne volonté évoluant sur le continent africain, qui à grand renfort de charité instaurent des liens verticaux par essence dissymétrique qui créent de la dépendance en résolvant un problème en surface sans attaquer la racine. Le reportage de Souleymane Gassama sur l’ONG ASI fait partie de ses bonnes surprises qui vous réconcilient avec la notion de solidarité, celle qui met en présence des humains dans une relation horizontale avec pour postulat d’aider son prochain et non d’asservir par le don.

L’ONG Actions de Solidarité Internationale a pour mission de venir en aide aux jeunes filles issues de milieux très défavorisées, en situation de rupture familiale et de grande précarité. C’est un sujet qui me touche d’autant plus que ASI intervient au Congo dont je suis originaire, et que je suis bien placée avec une mère travaillant auprès des veuves et des orphelins, pour mesurer l’impact des conflits armés dans la multiplication du phénomène des enfants mendiants dans les rues de nos capitales dans la quasi indifférence des habitants. SIC !

Certes des associations locales se mobilisent aussi pour endiguer ces micros phénomènes urbains tous liés comme les doigts d’une main : de la mendicité enfantine, à la prostitution en passant par la drogue et l’accès à la pornographie. Cependant la coordination et la fédération de toutes ses bonnes volontés fait souvent défaut, hélas, la nature humaine reprend parfois le dessus et chacun défend son pré carré au détriment de ceux qu’ils entendent soutenir. Aucune attente ne m’animait en découvrant le reportage de Souleymane Gassama, seule la curiosité de savoir pourquoi et comment l’ONG ASI intervient en République du Congo depuis 2006 en collaboration avec les locaux pour aider les jeunes filles mineures à quitter la rue en leur proposant un autre parcours de vie.

Deux choses  que je retiens sur l’ONG : 

1/ L’ONG ASI cherche à lutter contre la vulnérabilité de ces mineurs, souvent en situation de “prostitution de survie” contre un repas ou un toit. Le Centre d’accueil de Pointe Noire assure une prise en charge médico-psychosociale des jeunes filles. Elles ont ainsi accès aux soins corporels, à des activités, à un accompagnement psychosocial, à l’alphabétisation et à la construction d’un projet de vie.

2/ Une vingtaine de personnes interviennent dans le centre dans différents domaines que l’on dénombre en 5 pôles majeures qui sont le sanitaire et social, la formation professionnelle, la scolarisation, l’alphabétisation et enfin l’équipe mobile. Au Congo ASI est intervenue dans le cadre d’un programme de “Prévention du phénomène des enfants des rues” à Brazzaville, puis avec un module de “Prise en charge de jeunes filles en situation de rue et de vulnérabilité” initié à Brazzaville, et reproduit à Pointe Noire depuis 2012

Quelques mots sur le reportage de Souleymane Gassama : 

Une fois accommodée aux apartés emphatiques façon voix off de documentaire du journaliste sénégalais, le reportage est un équilibre parfait entre informations, impressions et entretiens des différentes personnes œuvrant au centre de la maison de la renaissance de Luc Antoine le responsable, à Naomi, en passant par Maman Vivi, Bienvenu, ou Gisèle l’infirmière et je suis sure que j’en oublie.  Notez bien que c’est assez inégal en terme de son, certains entretiens sont parasités par les bruits alentour, ceci étant dit, pour qui s’intéresse au sujet, aller jusqu’au bout est une nécessité. Je recommande même une seconde écoute pour prendre toute la mesure de cette maison de la renaissance.

Il y’a plusieurs moments importants dans ce reportage, mais celui qui m’a le plus touché est l’entretien avec Naomie. La familiarité de l’accent, cette forme de gêne qu’abhorrent certaines congolaises lorsqu’on les interrogent, et la fébrilité de son timbre m’ont ramené “à la maison”. Je l’imaginais ne sachant quelle contenance adoptée face à ce nouvel étranger qui vient poser des questions. Il va sans dire qu’elle a été au mieux préparée, au pire avertie de cette conversation. Cependant au ton de sa voix, je n’ai pu m’empêcher de visualiser son sourire en coin en découvrant son intervieweur. Oui je sais, chers lecteurs adorés, vous vous demandez en quoi l’identité du journaliste a un quelconque intérêt ? Sous des dehors anecdotiques, le fait que Souleymane Gassama porte son Sénégal sur son visage et par son accent a son importance dans le contexte de cette causerie. En effet, au Congo (celui que je connais) certaines filles ont une idée très arrêtée sur les sénégalais qu’elles cantonnent aux allées des marchés et aux boutiques de quartier, seules les gourgandines les fréquentent d’assez près pour en tirer partie et cracher allègrement dans la soupe.

Or imaginez ce qui a bien pu passer dans l’esprit de Naomie qui a commencé à “faire la vie” à quinze ans, parce que son père est mort, sa mère se trouve de l’autre côté du fleuve à Kinshasa, qu’il faut faire sa part dans la maison de fortune qui l’accueille. En général pour ces filles, le premier pas est franchi en répondant aux sollicitations des vendeurs dans les marchés, une solution immédiate, une culbute apparemment sans conséquence puisque nécessaire, un seul lieu et en sortant de là, le panier est rempli pour nourrir tout le monde jusqu’à la prochaine fois.  Si on exclut le contexte et la particularité culturelle, le moment de flottement au cours de l’entretien peut être mis sur le compte de la pudeur, du refus de revivre des expériences difficiles et la difficulté de faire des confidences à un homme sur son expérience avec d’autres hommes. Il y’a fort à parier que Naomie ne voyait qu’un jeune homme face à elle, pas un sociologue, pas un journaliste, juste un homme qui plus est : un sénégalais.

Je pense que maman Vivie ou l’infirmière Gisèle ont recueillies des témoignages de ces filles, et j’aime à penser qu’un travail mêlant psychologie et sociologie permettra à celles qui s’en sortent de devenir à leur tour des “aidantes” pour ASI.  La difficulté lorsque l’on veut aider des personnes marginalisées depuis longtemps, c’est qu’elles résistent “syndrome de Stockholm” aidant et rétorquent la plupart du temps,   à raison sans doute la phrase magique “tu ne peux pas comprendre, tu ne l’as pas vécu ou tu ne sais pas ce que c’est”. Or avoir dans ses rangs une Naomie devenue “pâtissière”  qui donnerait de son temps pour accompagner l’équipe mobile ferait toute la différence. Peut-être est-ce déjà le cas en 2017 pour d’autres résidentes de la maison de la Renaissance en 2017 ? Après tout le reportage date de 2015.

Ce qui m’a poussé à vous parler de cette association chers lecteurs adorés de la contribution digitale à la Journée Internationale de la Femme Africaine, c’est que je vous sais nombreux à être sensibles à ces problématiques, désireux d’aider et souffrant d’un manque de transparence ou de visibilité de nombreuses associations locales. Il se trouve que ASI pourrait vous réconcilier avec votre désir d’engagement puisque l’association Actions de Solidarité Internationale travaille sur le long terme et en collaboration avec les locaux. Aujourd’hui, l’ONG a besoin de dons, mais aussi de bénévoles, afin de mener à bien les programmes de réinsertion sociales destinés à changer la vie de ces jeunes filles.

Pour aller plus loin  :

Ecouter le reportage de Souleymane Gassama => Pointe Noire ASI 2015

Rendre une visite sur le site pour vous faire une idée  => www.asi-france.org

Comme toujours, vous êtes cordialement invités à partager vos avis sur le sujet, qu’il s’agisse du reportage, de l’ONG ou d’un témoignage sur le thème, vos commentaires pour peu qu’ils soient constructifs sont les bienvenus.

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