A 'invitation suivante : 

Cher Réassi, c'est à votre double littéraire le bien nommé Lareus Gangoueus que je m'adresse, l'homme qui chronique plus vite que son ombre, sans perdre en qualité et en faisant la part belle au fameux "beau sexe".

Votre mission si vous l'acceptez est de nous raconter votre muse africaine. Égérie de toujours ? Muse de fulgurance ? Qui est-elle ? D'où vient-t-elle ? Sous quelle forme son inspiration s'est-t-elle manifestée ? Qu'est ce qui la rend unique à vos yeux ?

Voici sa réponse ! 

Je devrai dire Maître Flore Agnès Nda Zoa, avocate au barreau de Genève. Cette dame venue du Cameroun, pays où les hommes et les femmes s’expriment avec une gouaille, un sens de la palabre, s’est mise en tête de créer un prix littéraire et, ainsi, de bousculer le processus de légitimation des œuvres littéraires francophones. Après avoir assistée à la remise du Prix Ahmadou Kourouma au salon du livre de Genève il y a deux ans, elle a décidé d’initier un prix littéraire proposé par des africains avec en plus la contrainte que les textes écrits par des auteurs d’Afrique et de sa diaspora, aient une forme d’engagement identifiable pour le lecteur.

Quand cette dame déterminée, chevillée sur sa vision a pris contact avec moi pour proposer une animation du stand de son association au salon du livre de Genève, je n’ai pas hésité. Me Nda Zoa ressemble à ses écrivaines volontaires, puissantes qui se sont décidées à changer le monde avec l’aide de leurs plumes. Ses romancières au plus près du réel, qui en esquissent le contour et qui expriment le désir de faire exploser les chaînes qui entravent la destinée de certains peuples. Mariama Ba, Maryse Condé, Aminata Sow Fall, Khadi Hane, Ken Bugul, pour ne citer que ces amazones du stylo à bille. Pour Flore-Agnès Nda Zoa, c’est cette même détermination, cette volonté de s’ouvrir le monde pour qu’il soit meilleur pour sa fille Malaïka et pour bien d’autres enfants. Cette volonté s’inscrit dans un projet complètement fou dans lequel elle s'engage sans réserve.

Le mécénat est encore un mot étrange et étranger en Afrique et dans sa diaspora. Mettre près de 30000 euros pour financer une initiative de légitimation de la production des meilleurs textes d’Afrique et de sa diaspora est un pari complètement dingue. Si Flore Agnès Nda Zoa n’est pas à proprement parlé une muse pour moi en tant que blogueur, je pense que sa démarche est inspirante dans sa capacité à prendre en charge une problématique et d’y trouver une solution. Les mots de l’écrivain Soudanais Abdelaziz Baraka Sakin à l’occasion de la remise du prix du livre engagé pour son roman Le messie du Darfour traduit en français, à savoir « Je dédie ce prix à mon peuple! » ont fait fondre en larmes la généreuse donatrice de ce prix. Moment d’émotion que je ressens encore. Au-delà de la remise d’un chèque et d’une œuvre d’art, il s’est passé quelque chose de fort entre l’écrivain, l’avocate et l’assistance. Un très beau moment.

Flore-Agnès Nda Zoa se donne donc les moyens de sa politique sans gémir. Elle bouscule un ordre établi. Elle sait identifier les compétences pour servir le projet qui dans le fond est de créer une communauté de lecteurs engagés. La passion aidant, elle n’hésite pas à se mettre en scène, par le moyen de la danse par exemple, sur les réseaux sociaux pour parler de ses coups de cœur. Cela semble irrationnel. Mais, c’est beau. Un seul doigt ne peut naturellement pas nettoyer un visage. Mais il peut inspirer des vocations pour que cessent enfin les jérémiades et que plus de mécènes émergent pour soutenir la culture africaine.